En mémoire
de…


Certain·es ont à cœur de ne pas oublier leur histoire migratoire et se mobilisent pour en faire reconnaître publiquement la mémoire.

Dans un parc, un cimetière, au détour d’une place, sur le mur d’un bâtiment, des plaques mémorielles, des stèles, souvent discrètes ou parfois imposantes, sont ainsi érigées.

Elles participent à la reconnaissance de ces histoires singulières mais aussi à leur ancrage dans la mémoire collective.

Plaque en mémoire des réfugiés chiliens – ©film 100soleils
Stèle des rapatriés d’Algérie Harkis et Pieds Noirs à Semoy
Panneau touristique bilingue franco-chinois Montargis –
V. Dassié
Monument de l’amitié franco-américaine à Châteauroux – DR
Fernanda Lopez – PM Wadbled
Plaque d’Evora à Chartres – PM Wadbled

Mémoire des migrations :
un ancrage reconnu


Parfois, des municipalités sont à l’initiative d’actions culturelles et mémorielles, mettant en valeur la place historique de l’immigration dans le peuplement local.

C’est le cas notamment à Montargis (les Chinois) à Châlette-sur-Loing (les Ukrainiens), à La Riche (des Portugais), à Saint-Pierre-des-Corps (les Algériens).

Ce travail mémoriel entraîne parfois la création d’un jumelage entre une nouvelle de la région et, par exemple une commune polonaise, portugaise, algérienne ou marocaine.

Statue du Maître Chinois Montargois Li Xiao Chao – V. Dassié

Dans les années 2000, dans de nombreux quartiers populaires, la Politique de la Ville a initié des rénovations urbaines importantes.

Devant la perspective de démolition des immeubles où ils ont vécu, les habitants ont souvent travaillé à construire la mémoire de leur quartier, en collectant photos et souvenirs, témoignages auprès des « anciens ».

À l’occasion du musée éphémère organisé en 2010 à Joué-les-Tours , l’association Terra Ceramica propose une exposition d’artistes locaux avant la destruction du bâtiment.

Image de fond : plaque rue des Harkis, Dreux – DR


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La transmission,
la mémoire


Au delà de l’histoire, les mémoires des migrations font l’objet d’actions spécifiques de la part des populations issues des migrations mais aussi de certaines collectivités locales pour lesquelles les migrations font partie du patrimoine commun.

Image de fond : plaque rue des Harkis, Dreux – DR

Associations d’entraide et de défense


Lors des crises économiques, l’immigration étant parfois pointée comme un facteur aggravant, la présence des immigré·es a souvent suscité des réactions hostiles et xénophobes au sein de la population.

Certains des immigré·es et leurs descendants, notamment ceux issus des anciennes colonies françaises, dénoncent un traitement discriminatoire à leur égard.

Affiche Chalette-sur-Loing – Festival « Ma ville est un monde »

Une manière de se prémunir de la xénophobie, des discriminations, a été de créer des réseaux d’entraide et des solidarités sociales, économiques et parfois politiques. Cet esprit d’entraide s’est particulièrement développé dans les années 1980.

Affiche exposition Parlons parure – DR
Affiche Mieux se connaître
pour mieux se comprendre
Affiche de la Cimade

Des associations de soutien et de défense des droits se sont emparées de la question de la régularisation des personnes dites « sans-papiers ».


UN EXEMPLE


À Orléans, l’association « Convergence à la Source » a été créée en 1985 à la suite de la « Marche pour l’égalité » de 1983.

Les objectifs de l’association allient lutte sociale et approche interculturelle au sein du quartier de La Source. Il s’agit de « promouvoir l’expression sociale et culturelle », de « favoriser l’échange fraternel » et « développer la solidarité ».

Après 37 ans d’existence, l’association sera dissoute par ses membres en 2021.

Image de fond : Activités d’entraide à l’Asti

Lutter pour les droits
du travail et l’engagement syndical


Dans le cadre du travail, les travailleurs immigrés ont été amenés à s’impliquer sur le plan syndical. Ce fut notamment le cas en 1920-1930 avec les Polonais dans la région de Bourges. Mais L’engagement syndical était parfois risqué pour ces étrangers qui craignaient des conséquences négatives sur leur droit de séjour.

Si peu d’entre eux sont syndiqués et affichent leurs idées ou participent à des grèves, certains, cependant s’engagent et sont alors solidaires de luttes communes avec les ouvriers français.

Manifestation ouvrière Hutchinson, 1970 – V. Dassié
Tracts Polonais, Cité ouvrière de Rosières à Lunery – G. Etienne

TÉMOIGNAGE


Samba, soudeur sénégalais, arrivé en 1971


« Dans les années 1980, je suis entré à la CFDT au moment où mes compatriotes étaient solidaires des combats des salariés français dans l’entreprise où je travaillais. Au début, ma présence aux réunions n’était que symbolique, comme celle de beaucoup de mes camarades. Je ne m’exprimais guère, je ne maîtrisais pas la langue française et je n’avais aucune expérience de ce genre d’action collective. (…) Les travailleurs immigrés ont beaucoup appris des syndicats français, même si leur participation n’y était pas toujours très active. »


Image de fond : Grève à l’usine Hutchinson,
1936 – coll. Viguet


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Une
diversité


Les personnes immigrées et étrangères contribuent également à la vie sociale à travers différentes formes d’engagements. Des mobilisations se font dans le cadre du monde du travail, de la défense des droits mais aussi autour de la vie culturelle.

Après la première période d’adaptation, certains, hommes et femmes, s’engagent dans des mouvements politiques, ou des associations aux objectifs divers, tels que regrouper les familles venues du même pays, organiser des activités sociales et culturelles dans le quartier.

Image de fond : Réalisation de fresques en mosaïque sous la direction de Hamid Jarboui – 1990

migrer
au féminin


Dès le 19e siècle, les femmes constituent une part importante des migrations mais restent peu visibles.

Elles ont été peu prises en compte par l’histoire de l’immigration alors qu’elles représentaient en moyenne 40 % des populations immigrées.

Famille polonaise – fonds Clergeau
Polonaise – fonds Clergeau_120, Fi_03484

Dans la région, entre les deux guerres, plusieurs milliers de jeunes femmes polonaises sont employées comme ouvrières agricoles dans les fermes en Indre et l’Indre-et-Loire.

Leurs conditions de vie varient selon les fermes : isolement linguistique, surcharge de travail, restrictions de liberté, non respect des congés, non paiement des gages, violences sexuelles dans les mauvaises fermes.

Polonaises – fonds Clergeau_120, Fi_02043

À Montargis, des jeunes filles sont également présentes parmi les étudiants travailleurs chinois. En 1920, sur 46 jeunes filles, âgées d’une vingtaine d’années, certaines poursuivront des études supérieures dans différents domaines scientifiques et artistiques.

Xian Jingyiu – DR

En 1975, la relative fermeture des frontières amorce le mouvement du regroupement familial qui se traduit par une augmentation de la présence féminine au sein des populations venues des pays du Maghreb.

Depuis les années 1990-2000, les femmes sont de plus en plus nombreuses, et en 2018, elles constituent même un peu plus de la moitié des populations migrantes en région Centre-Val de Loire.

Nevin venue de Turquie – B. Robert

Extrait du film Enquête d’identité de Lucien Martin et Eric Tellitochi – 36mn

Lucien Martin, professeur d’histoire-géographie à Blois, auteur du film « Etre AfroBlésois » donne le ton de son film sur les Blésois issus de l’immigration africaine.

voir les video

Louly extrait du film Si loin si proche, quatre temps de migration

Réalisé par Vincent Reignier et Vianney Lambert

voir le film

Image de fond : étudiantes chinoises à Montargis – DR

Trouver
refuge


Les réfugié·es fuient les troubles politiques de leur pays : dans les années 1920, des familles arméniennes arrivent en Touraine et, dans le Loiret, des populations russes et ukrainiennes, s’installent à Montargis et Chalette-sur-Loing.

Lors de l’indépendance de l’Algérie, de nombreux Français musulmans fuient les massacres, sont « rapatriés » en France avec l’aide de certains officiers français qui refusent de les abandonner : cette immigration occultée est particulièrement douloureuse.

Arrivée de réfugiés espagnols – ©contreculture.org

Entre 1936 et 1939, plus de 20 000 personnes fuyant la guerre civile en Espagne sont accueillies dans la région, comme à Noirlac dans le Cher ou à Lucé en Eure-et-Loir.

Dans les années 1970, les réfugié·es viennent du Chili, de l’Iran, et d’Asie du Sud-Est. Puis, dans les années 1990, ils viennent du Kosovo, du Rwanda, du Mali, d’Afghanistan, de Syrie, etc.

Les ressortissants de certains pays, notamment la Syrie, le Soudan, l’Irak, l’Afghanistan, le Kosovo et Haïti, demandent la protection de l’État Français, mais le statut de réfugié est de plus en plus difficile à obtenir.

Les « mineurs non accompagnés » sont des personnes de moins de 18 ans qui migrent sans parent ni représentant légal.

Lorsqu’ils sont reconnus mineurs, les départements doivent les prendre en charge, dans des dispositifs délégués à des associations.
Dans la région Centre-Val de Loire, comme dans le reste de la France, ce sont majoritairement des garçons entre 13 et 17 ans qui proviennent de pays d’Afrique de l’Ouest : Guinée, Mali, Côte d’Ivoire, mais aussi, moins nombreux, d’Europe de l’Est ou du sous-continent indien.

Mineurs non accompagnés

Dans la région, chaque année, ils sont quelques centaines à être reconnus mineurs et accueillis particulièrement en Indre-et-Loire et dans le Loiret.
Les raisons évoquées du départ sont diverses : pauvreté, accès impossible aux études, situations politiques, religieuses ou familiales menaçantes.

Image de fond : arrivée des familles harkies à Herveline – coll. priv. Saïd Balah


En région Centre-Val de Loire, le phénomène migratoire n’a jamais été d’une grande ampleur mais il est ancien, témoignant de la présence ponctuelle ou durable des populations venues d’ailleurs.

Ces migrations sont plurielles et donnent à voir une facette inattendue de l’histoire de la région.

Qui sont ces personnes étrangères ?
Comment sont-elles arrivées ?
Certaines sont-elles devenues françaises, dans quelles circonstances ?

Quelles ont été ou sont leurs conditions de vie, leurs implications dans la vie de quartier et leurs engagements ?
Quelles mémoires de ces migrations au plan régional ?

Nous allons le découvrir au fil des pages.