MÉMOIRES PLURIELLES PRÉSENTE

Histoires
de migrations


En région Centre-Val de Loire, le phénomène migratoire n’a jamais été d’une grande ampleur mais il est ancien, témoignant de la présence ponctuelle ou durable des populations venues d’ailleurs.

Ces migrations sont plurielles et donnent à voir une facette inattendue de l’histoire de la région.

Qui sont ces personnes étrangères ?
Comment sont-elles arrivées ?
Certaines sont-elles devenues françaises, dans quelles circonstances ?

Quelles ont été ou sont leurs conditions de vie, leurs implications dans la vie de quartier et leurs engagements ?
Quelles mémoires de ces migrations au plan régional ?

Nous allons le découvrir au fil des pages.


1

Pourquoi
partir ?


Les causes des migrations sont diverses : trouver refuge, améliorer les conditions de vie, étudier, fuir la guerre, retrouver sa famille.

Partir n’est jamais facile, il y a toujours une part d’arrachement et un sentiment d’exil.

Image de fond : toile de Rabia el Qotbi – DR

Trouver
refuge


Les réfugié·es fuient les troubles politiques de leur pays : dans les années 1920, des familles arméniennes arrivent en Touraine et, dans le Loiret, des populations russes et ukrainiennes, s’installent à Montargis et Chalette-sur-Loing.

Lors de l’indépendance de l’Algérie, de nombreux Français musulmans fuient les massacres, sont « rapatriés » en France avec l’aide de certains officiers français qui refusent de les abandonner : cette immigration occultée est particulièrement douloureuse.

Arrivée de réfugiés espagnols – ©contreculture.org

Entre 1936 et 1939, plus de 20 000 personnes fuyant la guerre civile en Espagne sont accueillies dans la région, comme à Noirlac dans le Cher ou à Lucé en Eure-et-Loir.

Dans les années 1970, les réfugié·es viennent du Chili, de l’Iran, et d’Asie du Sud-Est. Puis, dans les années 1990, ils viennent du Kosovo, du Rwanda, du Mali, d’Afghanistan, de Syrie, etc.

Les ressortissants de certains pays, notamment la Syrie, le Soudan, l’Irak, l’Afghanistan, le Kosovo et Haïti, demandent la protection de l’État Français, mais le statut de réfugié est de plus en plus difficile à obtenir.

Les « mineurs non accompagnés » sont des personnes de moins de 18 ans qui migrent sans parent ni représentant légal.

Lorsqu’ils sont reconnus mineurs, les départements doivent les prendre en charge, dans des dispositifs délégués à des associations.
Dans la région Centre-Val de Loire, comme dans le reste de la France, ce sont majoritairement des garçons entre 13 et 17 ans qui proviennent de pays d’Afrique de l’Ouest : Guinée, Mali, Côte d’Ivoire, mais aussi, moins nombreux, d’Europe de l’Est ou du sous-continent indien.

Mineurs non accompagnés

Dans la région, chaque année, ils sont quelques centaines à être reconnus mineurs et accueillis particulièrement en Indre-et-Loire et dans le Loiret.
Les raisons évoquées du départ sont diverses : pauvreté, accès impossible aux études, situations politiques, religieuses ou familiales menaçantes.

Image de fond : arrivée des familles harkies à Herveline – coll. priv. Saïd Balah

Améliorer
les conditions de vie


Étrangers en région Centre-Val de Loire, en % – Insee 2018

En 2017 les étrangers représentent 5% de la population globale de la région.


La région Centre-Val de Loire connaît un flux migratoire modéré. La migration répond aux besoins démographiques et de main-d’œuvre notamment après la Première Guerre mondiale et pendant les Trente glorieuses (1955 – 1975).
Pour de nombreuses personnes étrangères et leurs familles, la recherche de meilleures conditions de vie est le moteur de la migration.

Travailleurs polonais à Rosières – J. Kopec
Ouvriers polonais à la fonderie de Rosières –
Coll. priv. J. Kopec

Pour autant, la place laissée aux immigré·es dans la société française a longtemps été au bas de l’échelle sociale.

Image de fond : Fête de quartier à la Rabière, Joué-les-Tours – M. Nejmi

Étudier


Venir étudier en France est une aspiration pour de nombreux jeunes hommes et jeunes femmes originaires de différents pays : du Maghreb, d’Afrique sub-saharienne, notamment.

Dans les années 1960 – 1970, des conventions sont signées entre la France et certains pays notamment ceux liés par son histoire coloniale.

À la fin de leurs études, certain·es repartent dans leur pays et d’autres restent dans la région où ils pensent avoir de meilleures perspectives professionnelles.

Montargis et les Chinois : des liens anciens.

Un ancien étudiant de l’école agricole à Montargis fonde le mouvement « Travail – Études », et initie une circulation estudiantine entre la région et la Chine.

Entre 1912 et 1927, près de 400 chinois, garçons
et quelques filles viennent ainsi étudier à Montargis et étonnent la population locale par leurs vêtements et leurs nattes.
Ces personnes travaillent à l’usine Hutchinson pour payer leurs études.

Deng Xiiao Ping – DR

Parmi ces jeunes révolutionnaires figure également le futur leader politique Deng Xiaoping.

En 2018-2019, la région accueille 5 100 étudiant·es étranger·ères, dont 52 % sont des femmes.

Les étrangers représentent 8 % du total des étudiant.es de la région.

Ils viennent notamment du Maroc, de Chine, d’Algérie, du Sénégal, de Tunisie, de la Côte d’Ivoire.

Seynabou – P.M. Wadbled
Témoignage de Seynabou –
Mémoires Plurielles-Cent Soleils-2017

Image de fond : étudiants marocains –
coll. priv. A. Ghbabra

migrer
au féminin


Dès le 19e siècle, les femmes constituent une part importante des migrations mais restent peu visibles.

Elles ont été peu prises en compte par l’histoire de l’immigration alors qu’elles représentaient en moyenne 40 % des populations immigrées.

Famille polonaise – fonds Clergeau
Polonaise – fonds Clergeau_120, Fi_03484

Dans la région, entre les deux guerres, plusieurs milliers de jeunes femmes polonaises sont employées comme ouvrières agricoles dans les fermes en Indre et l’Indre-et-Loire.

Leurs conditions de vie varient selon les fermes : isolement linguistique, surcharge de travail, restrictions de liberté, non respect des congés, non paiement des gages, violences sexuelles dans les mauvaises fermes.

Polonaises – fonds Clergeau_120, Fi_02043

À Montargis, des jeunes filles sont également présentes parmi les étudiants travailleurs chinois. En 1920, sur 46 jeunes filles, âgées d’une vingtaine d’années, certaines poursuivront des études supérieures dans différents domaines scientifiques et artistiques.

Xian Jingyiu – DR

En 1975, la relative fermeture des frontières amorce le mouvement du regroupement familial qui se traduit par une augmentation de la présence féminine au sein des populations venues des pays du Maghreb.

Depuis les années 1990-2000, les femmes sont de plus en plus nombreuses, et en 2018, elles constituent même un peu plus de la moitié des populations migrantes en région Centre-Val de Loire.

Nevin venue de Turquie – B. Robert

Extrait du film Enquête d’identité de Lucien Martin et Eric Tellitochi – 36mn

Lucien Martin, professeur d’histoire-géographie à Blois, auteur du film « Etre AfroBlésois » donne le ton de son film sur les Blésois issus de l’immigration africaine.

voir les video

Louly extrait du film Si loin si proche, quatre temps de migration

Réalisé par Vincent Reignier et Vianney Lambert

voir le film

Image de fond : étudiantes chinoises à Montargis – DR


2

Vivre
en région

Image de fond : Cité des Sables, La Riche – F. Bourdarias

Du travail
avant tout


Le travail occupe une place centrale dans l’histoire des migrations. L’immigration de travail se développe surtout au 20e siècle. Durant les périodes de plein-emploi, des ouvrier·ères originaires de différents pays (Pologne, Portugal, Turquie, Maroc, Algérie) viennent pallier le manque de main-d’œuvre dans l’agriculture, l’industrie, la construction. Ils sont généralement affectés aux tâches les plus ingrates et les moins rémunérées.

Travailleurs portugais dans une carrière de pierres
Ouvriers polonais à la fonderie de Rosières – coll. priv J. Kopec

Malgré des conditions souvent peu favorables, des réussites socio-économiques existent. Cependant, pour les immigré·es et leurs enfants, l’ascension sociale reste difficile. À la différence des non immigrés, ces personnes rencontrent des difficultés sur le marché du travail et leur taux de chômage est généralement plus important, atteignant parfois le double.

Ouvriers algériens, chantier construction à Tours –
F. Bourdarias
Chantier de construction, Orléans-la-Source – Archives municipales d’Orléans

Image de fond : travailleurs polonais à Rosières –
J. Kopec

La vie
quotidienne


La présence des immigré·es influence la vie des territoires, dans les quartiers populaires, dans les commerces et aussi par l’implantation de nouveaux lieux de cultes.

• Se loger : une préoccupation principale

Dans les premiers temps de la migration, les conditions de logement sont précaires et parfois même insalubres.
Dans les années 1950 et 1960, des ouvriers immigrés vivent dans des baraques de chantier ou des cabanes, des quasi bidonvilles comme à Saint-Pierre-des-Corps ou à Larçay.

Certains sont logés dans des hébergements spécifiques comme les foyers Sonacotra.
Le regroupement familial signale la fin des habitats précaires que beaucoup avaient acceptés jusque-là.

Exemple de foyer Sonacotra de la région parisienne à l’image de ceux qui existaient à Tours.
La cité des Sables, ville de La Riche – Jean-Michel Salaün
La Rabaterie, Saint-Pierre-des-Corps, 1970 –
Archives Municipales Saint-Pierre-des-Corps

Des vieux quartiers aux nouvelles cités.

Les familles trouvent d’abord à se loger dans des appartements souvent peu chers et insalubres des vieux quartiers des centre-ville. Dans les années 1970, leur habitat s’améliore avec l’accès au logement HLM, mais aussi à des pavillons dans des communes périurbaines.

Vieux Tours, environ 1960-70 – DR

Les quartiers d’habitat social où sont logées de nombreuses familles immigrées ont souvent mauvaise réputation et sont parfois ségrégués.
Pourtant, ces familles sont attachées à leur quartier, où elles contribuent à animer l’espace public en investissant les associations, en fréquentant les commerces et en se dotant de lieux de culte. Ces quartiers jouent un rôle important de sociabilité.

Image de fond : Baraquements portugais,
« Les Brosses » – Larçay,
R. Collet

• Les commerces et les marchés


Les commerces tenus par des immigré·es sont généralement des épiceries, des restaurants « exotiques », des cafés de quartier.
Ces derniers sont aussi des lieux d’accueil et de sociabilité pour les immigrés.

Ces commerces sont peu nombreux dans les villes de la région mais facilement reconnaissables à leur enseigne et à leurs produits.

Les marchés, comme celui de l’Argonne à Orléans ou de La Rabière à Joué-lès-Tours proposent une grande diversité de produits témoignant de la présence des personnes issues de la migration dans la région.

Partie de domino au café Chalette, années 1970 –
archives municipales de Chalette-sur-Loing
Magasin cambodgien à Joué-les-Tours – Pierre Billon

Image de fond : La Rabière, sur le marché – M. Nejmi

• Vivre sa religion : les lieux de culte


Les croyances, les religions accompagnent les personnes dans la migration. Certaines, relevant du christianisme, rejoignent un socle religieux déjà présent, tandis que d’autres comme l’islam ou le bouddhisme, introduites plus récemment, peinent parfois à trouver une place légitime dans le paysage religieux régional.

Les pratiques collectives se perpétuent grâce au milieu associatif et des lieux de culte spécifiques sont implantés dans la plupart des villes où vivent les familles immigrées et leurs enfants.

C’est le cas par exemple pour les chrétiens qui ont édifié des églises russes et ukrainiennes de rite orthodoxe au cours des années 1920, ou des temples évangéliques rassemblant des immigré.e.s d’Afrique subsaharienne.
Les réfugié·e·s d’Asie du Sud Est, arrivé.e.s à partir de 1975, ont pour leur part soutenu la création d’une pagode bouddhique comme c’est le cas à Orléans.

Enfin, pour les populations musulmanes du Maghreb et d’Afrique subsaharienne, la mosquée remplace désormais le lieu de prière qui avait été, dans les années 1970-80, rapidement aménagé dans un appartement

Mosquée, Orléans – P M Wadbled

Les associations à but cultuel jouent un rôle important au moment du décès, aidant les familles à organiser l’inhumation du défunt dans le pays d’origine ou travaillant localement à la mise en œuvre d’espaces religieux dans les cimetières municipaux, comme c’est le cas pour les « carrés musulmans ».

Procession religieuse polonaise à Rosière, 1960 – J. Kopec
Sortie de fête religieuse polonaise à Rosière, 1950 J. Kopec
Procession portugaise à Sainte-Solange – G. Etienne

Image de fond : Cérémonie à la pagode laotienne Orléans –
N. Tilhou


3

Une
diversité


Les personnes immigrées et étrangères contribuent également à la vie sociale à travers différentes formes d’engagements. Des mobilisations se font dans le cadre du monde du travail, de la défense des droits mais aussi autour de la vie culturelle.

Après la première période d’adaptation, certains, hommes et femmes, s’engagent dans des mouvements politiques, ou des associations aux objectifs divers, tels que regrouper les familles venues du même pays, organiser des activités sociales et culturelles dans le quartier.

Image de fond : Réalisation de fresques en mosaïque sous la direction de Hamid Jarboui – 1990

Lutter pour les droits
du travail et l’engagement syndical


Dans le cadre du travail, les travailleurs immigrés ont été amenés à s’impliquer sur le plan syndical. Ce fut notamment le cas en 1920-1930 avec les Polonais dans la région de Bourges. Mais L’engagement syndical était parfois risqué pour ces étrangers qui craignaient des conséquences négatives sur leur droit de séjour.

Si peu d’entre eux sont syndiqués et affichent leurs idées ou participent à des grèves, certains, cependant s’engagent et sont alors solidaires de luttes communes avec les ouvriers français.

Manifestation ouvrière Hutchinson, 1970 – V. Dassié
Tracts Polonais, Cité ouvrière de Rosières à Lunery – G. Etienne

TÉMOIGNAGE


Samba, soudeur sénégalais, arrivé en 1971


« Dans les années 1980, je suis entré à la CFDT au moment où mes compatriotes étaient solidaires des combats des salariés français dans l’entreprise où je travaillais. Au début, ma présence aux réunions n’était que symbolique, comme celle de beaucoup de mes camarades. Je ne m’exprimais guère, je ne maîtrisais pas la langue française et je n’avais aucune expérience de ce genre d’action collective. (…) Les travailleurs immigrés ont beaucoup appris des syndicats français, même si leur participation n’y était pas toujours très active. »


Image de fond : Grève à l’usine Hutchinson,
1936 – coll. Viguet

Associations d’entraide et de défense


Lors des crises économiques, l’immigration étant parfois pointée comme un facteur aggravant, la présence des immigré·es a souvent suscité des réactions hostiles et xénophobes au sein de la population.

Certains des immigré·es et leurs descendants, notamment ceux issus des anciennes colonies françaises, dénoncent un traitement discriminatoire à leur égard.

Affiche Chalette-sur-Loing – Festival « Ma ville est un monde »

Une manière de se prémunir de la xénophobie, des discriminations, a été de créer des réseaux d’entraide et des solidarités sociales, économiques et parfois politiques. Cet esprit d’entraide s’est particulièrement développé dans les années 1980.

Affiche exposition Parlons parure – DR
Affiche Mieux se connaître
pour mieux se comprendre
Affiche de la Cimade

Des associations de soutien et de défense des droits se sont emparées de la question de la régularisation des personnes dites « sans-papiers ».


UN EXEMPLE


À Orléans, l’association « Convergence à la Source » a été créée en 1985 à la suite de la « Marche pour l’égalité » de 1983.

Les objectifs de l’association allient lutte sociale et approche interculturelle au sein du quartier de La Source. Il s’agit de « promouvoir l’expression sociale et culturelle », de « favoriser l’échange fraternel » et « développer la solidarité ».

Après 37 ans d’existence, l’association sera dissoute par ses membres en 2021.

Image de fond : Activités d’entraide à l’Asti

Les associations
d’« originaires »


Les associations « d’originaires » de différents pays : Maroc, Cambodge, Portugal, Algérie, Laos, chili, Ukraine etc, comme partout en France, se sont développées à partir de 1981, avec la libéralisation du droit d’association des étrangers.

La plupart de ces associations s’attachent à maintenir et valoriser des éléments culturels du pays d’origine et à promouvoir la solidarité entre ses membres.

En offrant un lieu et des moments de convivialité, l’association permet notamment aux personnes récemment arrivées de trouver des repères familiers et rassurants dans les premiers temps de l’immigration.
Elles trouvent auprès des plus anciens, des conseils et des recommandations pour faciliter l’adaptation à leur nouvelle vie.

Fête de l’association des boudhistes laotiens à Orléans – N. Tilhou

À travers leurs activités : les danses, la musique, l’apprentissage de la langue, l’histoire du pays, la gastronomie, ou le sport, les membres retrouvent un peu de l’ambiance du pays.

Mais c’est aussi une “vitrine” en direction des membres de la société d’accueil qui sont invités lors de repas de fêtes, cérémonies religieuses, Nouvel An, spectacles, rencontres sportives.

Ukrainiens, Ballet Slava – V. Dassié
Danses turcs à Chalette – V. Dassié
Association algérienne Tours

Image de fond : Hmongs à Aubigny – G. Etienne


4

La transmission,
la mémoire


Au delà de l’histoire, les mémoires des migrations font l’objet d’actions spécifiques de la part des populations issues des migrations mais aussi de certaines collectivités locales pour lesquelles les migrations font partie du patrimoine commun.

Image de fond : plaque rue des Harkis, Dreux – DR

Mémoire des migrations :
un ancrage reconnu


Parfois, des municipalités sont à l’initiative d’actions culturelles et mémorielles, mettant en valeur la place historique de l’immigration dans le peuplement local.

C’est le cas notamment à Montargis (les Chinois) à Châlette-sur-Loing (les Ukrainiens), à La Riche (des Portugais), à Saint-Pierre-des-Corps (les Algériens).

Ce travail mémoriel entraîne parfois la création d’un jumelage entre une nouvelle de la région et, par exemple une commune polonaise, portugaise, algérienne ou marocaine.

Statue du Maître Chinois Montargois Li Xiao Chao – V. Dassié

Dans les années 2000, dans de nombreux quartiers populaires, la Politique de la Ville a initié des rénovations urbaines importantes.

Devant la perspective de démolition des immeubles où ils ont vécu, les habitants ont souvent travaillé à construire la mémoire de leur quartier, en collectant photos et souvenirs, témoignages auprès des « anciens ».

À l’occasion du musée éphémère organisé en 2010 à Joué-les-Tours , l’association Terra Ceramica propose une exposition d’artistes locaux avant la destruction du bâtiment.

Image de fond : plaque rue des Harkis, Dreux – DR

En mémoire
de…


Certain·es ont à cœur de ne pas oublier leur histoire migratoire et se mobilisent pour en faire reconnaître publiquement la mémoire.

Dans un parc, un cimetière, au détour d’une place, sur le mur d’un bâtiment, des plaques mémorielles, des stèles, souvent discrètes ou parfois imposantes, sont ainsi érigées.

Elles participent à la reconnaissance de ces histoires singulières mais aussi à leur ancrage dans la mémoire collective.

Plaque en mémoire des réfugiés chiliens – ©film 100soleils
Stèle des rapatriés d’Algérie Harkis et Pieds Noirs à Semoy
Panneau touristique bilingue franco-chinois Montargis –
V. Dassié
Monument de l’amitié franco-américaine à Châteauroux – DR
Fernanda Lopez – PM Wadbled
Plaque d’Evora à Chartres – PM Wadbled

Pratique
artistique


Parmi les immigré·es et leurs descendant·es, certains sont des artistes dans diverses disciplines, et certaines de leurs productions contribuent à la mémoire de l’immigration…

Hamid Jarboui, céramique – H. Jarboui
Spectacle, Serge Catanese à Montargis – PM Wadbled
Stabile-mobile, Alexandre Calder, Amboise – PM Wadbled
Sculpture de Max Ernst, Amboise – DR

Image de fond : Michel Talata, chronique – M. Talata

Espace
de l’intime


La mémoire de la migration est aussi présente dans l’intimité du foyer à travers des objets, souvent ordinaires, qui n’ont pas vocation à être exposés aux yeux de tous.
Certains rappellent des saveurs, d’autres deviennent des éléments de décoration tandis que d’autres encore ont simplement une valeur affective, et sont précieusement conservés dans des coffres ou des armoires.

À travers eux, des ancêtres, des amis, des parents, des moments de vie et un pays lointain restent présents. Ce sont aussi des supports de narration et de transmission aux jeunes générations.

Mocassins achetés pour venir
en France – C. Camus
Petit Coran – C. Camus
Plat pour la préparation du couscous –
C. Camus
Panier pour la préparation du riz « Tipkhao », Laos –
G. Etienne
Ours en peluche, Algérie – C. Camus
Série de Matriochka dépareillées, Leningrad, 1975-2005 –
C. Camus
Ensemble Wax du Congo –
C. Camus
Robe de mariage Tunisie –
C. Camus
Objet du trousseau de mariage, Tunisie –
C. Camus

4

Conclusion
la part des immigrations aujourd’hui


En 2017, la région Centre-Val de Loire compte environ 184 000 immigré·es, que ces personnes soient toujours étrangères ou devenues françaises.

Elles résident en majorité dans les agglomérations où l’emploi est plus important, notamment dans les départements du Loiret, de l’Indre-et-Loire et de l’Eure-et-Loire.

Elles sont en majorité originaires du Portugal, du Maroc, de la Turquie et pour les arrivées les plus récentes, davantage issues de pays africains subsahariens.

L’ensemble de ces migrations, passées et présentes, fait partie de l’histoire régionale.
Elles ont contribué et contribuent encore, aujourd’hui, au développement économique, démographique, culturel régional.

Fête de quartier à Montargis
©Association des Parents de Chautemps

Les associations, les commerces, les sociabilités sont autant de signes de l’ancrage des personnes issues des migrations, devenues des habitants à part entière.

Cet ancrage ne signifie pas que les liens avec le pays d’origine disparaissent. Au contraire, il permet le développement de circulations entre ici et là-bas mais aussi, parfois, au sein d’une diaspora plus large, s’étendant dans différents pays d’Europe du nord ou d’Amérique.

Ces mobilités permettent que les idées, les valeurs, les objets circulent, au sein d’un espace transnational peu visible et plus dynamique qu’on le croit.

C’est une facette peu connue de la région Centre-Val de Loire que l’histoire des migrations permet de découvrir.